Par Claudette Cormier

samedi 1 juillet 2023

Sur la route du chaos

Nous sommes le 30 juin 2023. À la veille de la fête de la Confédération, nous sommes en congé. Bien entendu, nous projetons d'aller sur le terrain en ce jour férié. Tout d'abord dès l'aube, la journée commence raide alors que nous nous faisons réveiller par du drôle de bruit à 5h30. Sur le toit de notre résidence, nous entendons à répétition des « BOUM... BOUM...». Le son nous rappel le déplacement d'un écureuil qui coure sur une toiture. Cependant, le pied est trop pesant pour que ce sot ce petit mammifère. Un raton-laveur alors? Non plus. Il n'a rien pour lui là-haut. Par la fenêtre qui est fermée, nous entendons des cris provenant de jeunes Grands Corbeaux. Serait-ce possible que ce soit eux qui font tout ce vacarme? Germain et moi sortons de la chambre à coucher et sortons sur le patio. Oh! Les vilains corbeaux! La famille au grand complet, cinq ou six individus, sautille sur le toit en émettant leurs cris rauques et forts. Puis, je tape fort mes mains afin de les faire partir. Surpris par le bruit soudain, ils quittent le toit en catastrophe de tout bord, tout côté. Les juvéniles s'éloignent vite, s'époumonant de leurs cris gras et comiques. Après cela, plus question de retourner se coucher. On était trop réveillés.

Cela faisant, je me dirige ensuite vers une fenêtre pour tirer les rideaux. BA-DANG! Subitement, les rideaux tombent avec fracas. Quant au pôle à rideaux en métal, il se scinde en deux et résonne un bon moment pendant qu’il roule sur le plancher. Ben voyons… Que se passe-t-il ce matin? 

Haussant les épaules devant ces événements, nous nous habillons et empaquetons les optiques dans la voiture. Notre but aujourd’hui est d’aller excursionner à Hébertville. La veille de ce congé férié, Germain avait proposé qu'on aille faire un bel inventaire d'oiseaux dans cette localité. Au bout d’une heure de route, en arrivant sur les lieux, il pleut. Cette cellule de pluie n'apparaît pas sur la carte radar d’Environnement Canada. Bon. Nous commençons à recenser les oiseaux à l'oreille en restant dans la voiture tout en sirotant nos breuvages chauds. Finalement, après quelques arrêts où nous ne recensons que quelques Bruants chanteurs et des Viréos aux yeux rouges, nous abandonnons le projet. La pluie n'arrête pas. O.K.... Essayons du côté de Métabetchouan. Ce sera peut-être plus chanceux pour nous de nous éloigner des montagnes de la réserve faunique des Laurentides, car Hébertville est situé très près du contrefort. 

Nous sortons de la localité d’Hébertville quelque peu irrité de la chose. Après trente minutes à rouler dans les rangs où la chaussée est très maganée pour se rendre au Grand Marais, voilà qu’en arrivant dans le secteur, nous pénétrons soudain un gros pan de brume épais à couper au couteau qui enveloppe complètement le site! Pffff! Non, mais... Les dieux sont contre nous ce matin.

Puisque les éléments de la nature ne collaborent pas du tout, nous allons déjeuner dans un resto à Métabetchouan. À cause du long congé, le resto est assez plein avec seulement deux serveuses qui pédalaient pour servir tout le monde. Près de nous, une table de six personnes. Dans ce groupe, une dame n'arrête pas de rire très fort. Fatigante à souhait. Chacun de ses rires nous perfore les oreilles. Coû donc! Est-ce qu’elle se pense seule au monde avec sa gang? Germain lui, bouillonne de colère. Pas moyen de relaxer en mangeant. En plus, depuis très tôt ce matin, des ornithologues cherchent à le rejoindre sur son cellulaire pour l’aviser des belles raretés que ceux-ci observent ce matin à Petit-Saguenay. Une matinée ratée. Des excursions ratées. Un déjeuner raté. BOF…

Terminant rapidement notre déjeuner pour sortir au plus vite de ce trop plein de décibels, nous effectuons une tournée autour des bassins de la station d'épuration des eaux usées dans la même localité. Bon. Au moins, il ne pleut pas ici et la brume est levée. Suite à l’observation de quelques nichées de Canards colverts, est-ce qu'on peut dire qu'il n'y avait absolument rien de palpitant? Puis, une Hirondelle bicolore m'a rasé la tête à deux reprises, le vent produit par les ailes me soulevant quelques mèches de cheveux. Nous étions non-loin d'un nichoir. Suite à cette excursion « palpitante », nous nous dirigeons une seconde fois vers le Grand Marais. Enfin, la visibilité est bonne. Mais avec le peu d’oiseaux recensés, rien pour soulever notre moral. Ma motivation de recenser les oiseaux a complètement décrochée. Pu le goût.

Un Urubu à tête rouge qui se repose sur la grange au loin (C. Cormier)

Voici une photo très agrandie de l'oiseau (C. Cormier)

Un beau Bruant des prés qui lançait son chant bourdonnant (C. Cormier)

Abusés par cette journée qui a très mal démarrée, nous troquons l’observation des oiseaux pour l’admiration de plantes vertes. Depuis quelques semaines, je voulais visiter les serres Dame-Nature à Saint-Gédéon, chose qu'on a fait en quittant le Grand Marais. Dans notre cerveau, les rires de la dame au resto résonnent encore. Pendant que Germain cuve ses déceptions dans les rangées de plantes vertes derrière moi, je me délecte en admirant les variétés de plantes. Après avoir fait quelques achats dans ce commerce, nous quittons la région du Lac Saint-Jean. Nous laissons derrière nous cette foutue matinée où rien n’a fonctionné comme prévu. Rendus à Saguenay (arrondissement d’Arvida), nous visitons une autre serre, Boréalis de son nom. Nous avons été bien surpris par la grandeur du commerce et de la variété de leurs produits. Je me promet d'y retourner!

Puis, en roulant vers la maison, le téléphone sonne dans la voiture. C'est le propriétaire de notre ancien appartement qui nous rejoint. Depuis presqu'un mois, nous recherchions mon chevalet pour artiste. Pensant l'avoir perdu pendant le déménagement, Germain a récemment eu une intuition. Il pense avoir juché le chevalet en hauteur dans la remise près des poutres. C'était bien cela. Donc, ce fut un autre imprévu. Nous nous sommes immédiatement rendus à la remise de l’appartement, place que nous ne voulions plus jamais mettre les pieds et avons récupéré le chevalet en question. Heureusement, celui-ci a pu rentrer au complet dans le véhicule, cela par-dessus tout notre attirail d'ornithologues et de nos vêtements pour les au-cas où. Entre nos têtes à l'avant du véhicule, je tenais la tête du chevalet. Il brassait et faisait du bruit lorsque nous roulions dans les rues de Chicoutimi. J’étais très contente de retrouver mon outil de travail! Quelle artiste serais-je sans mon chevalet? C’est comme si je voulais observer les oiseaux sans mes jumelles!

La voiture remplie en longueur, en largeur et en hauteur, nous arrivons à la maison. Bilan du jour : notre banque d'espèces est au plus bas, nous n’avons pas réussi à faire ce qu’on voulait et notre moral tente de remonter la pente. Arrivés à la maison, nous débarquons le tout. Le chevalet sous mes bras, je le dépose dans un coin du salon, contente de le retrouver enfin. Germain lui, repars aussitôt et se dirige vers La Baie pour y observer des oiseaux intéressants et rendre visite à sa mère. La journée se répare tranquillement et les dieux méchants nous lâchent enfin.

Quant à moi, j'étais heureuse d'atterrir dans mon havre de paix et me reposer. Depuis belle lurette, je ne coure plus les raretés et je m’en porte très bien. J’aime prendre mon temps pour contempler, admirer, respirer et jouir de ce qui m’entoure. Cela est dorénavant possible, puisque maintenant nous vivons auprès de la nature et dans un environnement bucolique. Puis durant l’été, délaisse un peu les oiseaux et me concentre sur l’observation des papillons nocturnes. Il s’agit d’un autre merveilleux monde à explorer! 

Voilà donc le récit qui exprime bien ce que nous avons vécu lors de cette foutue journée qui n’en finissait plus de finir avec tout ces imprévus et complications.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire