Par Claudette Cormier

mardi 10 décembre 2013

Le Faucon gerfaut, prince de l'Arctique

Nous sommes samedi le 7 décembre 2013. Germain est déjà levé et il s'affaire à observer les oiseaux qui sont aux mangeoires. Bien... les deux Juncos ardoisés sont présents ainsi que les autres espèces d'oiseaux, régulières dans notre petit patelin : Mésanges à tête noire, Sittelles à poitrine rousse, Pic chevelu, Pic mineur et... « Clo? Je crois que je viens d'apercevoir un Tarin des pins! » Germain m'avise d'un ton pressant. Les yeux petits et le cerveau encore un peu embrumé, je me dirige vers la porte d'entrée pour le rejoindre avec mes jumelles en main. Pendant qu'il ausculte chacun des Chardonnerets jaunes qui viennent d'arriver pour retrouver le supposé tarin, j'étais sur le point de lui dire, comme le dit si bien avec un air taquin notre ami Hugues Simard de La Baie, qu'il manquait un peu de terrain. C'est une façon amicale de dire entre nous que « je crois que tu t'es trompé ». Et bien non. Il avait raison. Germain a retrouvé ce satané tarin qui tente de prendre le contrôle d'une mangeoire en donnant des coups de becs aux chardonnerets. C'est bel et bien un tarin.

N'ayant pas encore déjeuné, j'ajoute de l'eau dans la bouilloire pour faire mon café instantané du matin. Pendant que l'eau commence à chauffer, je me dirige vers la porte-fenêtre et je jette un oeil dans le télescope afin de faire une première ronde afin d'observer des espèces aquatiques dans l'entrée du fjord. Devant la résidence ces jours-ci, le yo-yo de la météo fait que la baie gèle et dégèle à répétitions. Aujourd'hui, tout est à l'eau libre. Puis, j'entends l'eau qui s'échauffe davantage dans la bouilloire, mais elle ne siffle pas encore pour le moment. J'ai encore du temps pour effectuer de la recherche d'oiseaux au télescope.

La vue à partir de la porte-fenêtre


La flèche littorale au loin lors de la marée descendante

J'effectue un scan sur les rochers de la flèche littorale. Soudain, je m'immobilise. Il y a un oiseau d'apparence foncé ayant une forme ovale posé à mi-flèche. D'un geste vif de la main, je tourne le zoom de l'oculaire au maximum. Tout mes sens m'apparaissent soudainement, le tableau de bord s'allumant en même temps, en rouge. De ma voix, je casse le silence dans la maison : « Hé! Germain, vite! Viens voir! Je crois que j'ai un gerfaut! » J'entends le froissement des vêtements de Germain. Il prend ma place et regarde l'oiseau dans l'oculaire. Pendant qu'il l'observe, je débranche l'alimentation électrique de ma bouilloire. À peine avais-je tourné le dos que Germain s'agitait partout dans la maison claquant les portes des garde-robes. D'un pas pressant, il se change, prend au passage ses optiques et sa caméra dans le but d'aller à la rencontre du rapace. C'est que l'oiseau de proie est situé à deux kilomètres de notre résidence et ne peut être photographié proprement dit de notre maisonnée. Sans avoir eu l'occasion de déjeuner, voilà que Germain est parti à l'aventure. Moi, je reste à la maison, car je ne suis pas prête.

Je retourne au télescope et observe tous les détails possible du rapace. De temps en temps, je fouille aussi les eaux du Saguenay pour repérer des canards de mer : « Garrots à oeil d'or... oui...  Ah! Voilà la bande de Grands Harles au large de la flèche. » Un coup de télescope sur la pointe à Gonie le long du rang Saint-Martin à Chicoutimi me révèle la présence d'un Pygargue à tête blanche adulte posé sur son Pin blanc favori. Comme à l'accoutumé, celui-ci attend que la marée commence à descendre pour effectuer sa chasse le long des battures. Je reviens ensuite au Faucon gerfaut. Oh! Le rapace s'étire les ailes. Ça, ça veut dire qu'il a l'intention de s'envoler. Comme de fait, le gerfaut part comme une balle et longe la flèche littorale en se dirigeant vers la route Tadoussac, non loin de Germain. Bon... puisque l'oiseau est disparu de mon champ, je retourne à ma bouilloire et la rebranche dans la prise. Comme l'expression dit par mes camarades ornithologues, je suis encore dans mon linge mou et m'aligne pour prendre mon café matinal. Le matin, j'aime bretter et prendre mon temps.

« DRING! DRING! » le téléphone retentit dans la maison où le silence régnait en maître. C'est Germain au bout du fil. De sa voix un peu essoufflé, il lance : « Clo! Habilles-toi! Je vais aller te chercher. Le gerfaut est posé sur les battures sur le bord de la route ! » Pour une deuxième fois, je débranche la bouilloire. Puis je file illico dans ma chambre. Bing! Bang! Les portes des garde-robes s'ouvrent brusquement, les pyjamas s'envolent sur le lit, je cours chercher ma caméra et mes jumelles et j'enfile mon linge d'hiver . Je suis en train de mettre mes bottes lorsque Germain est déjà devant la porte d'entrée et m'attend. Oh, ciel! Je n'ai pas eu le temps de prendre mon café. Que c'est cruel!


Le Faucon gerfaut sur la flèche vu par Germain (photo de Germain Savard)


Le faucon s'envole (photo de Germain Savard).

Nous voilà partis pour les battures ! Rendus près de celles-ci, Germain stationne la voiture du côté opposé de la rivière Saguenay, en face du marais de Canards Illimités. Il me dit de me pencher pour aller vers le gerfaut que nous voyons posé sur un rocher près de la route Tadoussac. Il me laisse y aller tout seul afin d'augmenter mes chances de le filmer. Le corps replié à l'Indiana Jones pour me cacher, la caméra dandinant au cou, je traverse le boulevard. Bordel! Il fait extrêmement froid aujourd'hui. Le vent est cinglant. Ça va être dur pour les mains et pour la manipulation de la caméra. Accroupie sur l'accotement, mes poignets sont accoudés sur le garde-fou en métal. Mon corps lui est blotti contre des amoncellements de glaces durs laissés par la charrue et qui me rentrent dans l'estomac. Une fois stabilisée, je me mets en mode vidéaste et commence à filmer le faucon. Pendant ce temps, Germain attend dans la voiture. Lui, il sait ce que je fais, mais les dizaines de véhicules qui passent près de moi à un mètre à peine regardent eux la motte rose vive (mon veston) qui git au sol. Se faisant, ils ralentissent un peu leur course pour finalement réaliser que c'est quelqu'un qui fait là une chose très bizarre. Il me semble de les entendre dire à leurs copains : « Hé, les mecs! J'ai vue une folle sur le bord de la route ce matin qui était couchée et qui ne bougeait pas... »

Les battures cette journée-là


Le Faucon gerfaut aux abords de la route


Le faucon dans toute sa splendeur (photo de Germain Savard)

Malgré le trafic lourd, je me concentre et me coupe du bruit et des regards inquisiteurs des voyageurs. Dès cet instant, l'univers nous appartient, le Faucon gerfaut et moi. Nous sommes maintenant seuls au monde. Pendant que je prends des clips, je l'admire. Son plumage est de couleur gris acier foncé. Le corps robuste, son plumage est gonflé pour se parer du froid. D'allure calme sur son rocher, il n'est aucunement nerveux. De temps en temps, il tourne légèrement la tête pour vérifier ce qui se passe dans son environnement. Lui, il est relaxe, mais moi, non. Je suis devant l'une de mes espèces préférées dans le monde ailé. Après l'Aigle royal, c'est mon deuxième favori. Mon coeur bat la chamade devant cette royauté qui est tout près de moi et que je considère comme un prince de l'Arctique. À genou à ses côtés, je succombe par sa beauté et sa noblesse. Oh! Il me regarde! Oui! Le gerfaut à daigner me regarder, un cadeau pour moi toute seule! À cet instant, je lui cède mon âme. Ah! Ses yeux vifs et acérés m'ont électrisé, foudroyé sur place! C'est la première fois qu'un gerfaut fait contact visuel avec moi. Dans l'intimité de mon être, je communie avec lui, le salue et lui dis qu'il est magnifique. Il s'agit d'un moment très spécial pour moi. On aurait dit que le temps s'est figé pendant quelques secondes ou quelques minutes, je ne sais trop.

 Le Faucon gerfaut aux aguets (vidéo de Claudette Cormier)


Le faucon au regard princier (vidéo de Claudette Cormier)

Aie! Mes doigts me font mal. Le vent glacial me pétrifie. Je sors du cocon douillet de mon esprit et revient brusquement à la réalité du froid. À côté de moi, j'entends les pas de Germain, les bottes faisant craquer chaque morceau de glace sur la chaussée. Il s'accroupie près de moi et installe le télescope. Les mains jointes portées sur ma bouche, je souffle de l'air chaud sur celles-ci en espérant les réchauffer. Germain m'invite à  regarder le rapace au télescope. Ouf! C'est le coup de grâce! J'ai beau être amoureuse de Germain, mais là, il a un sérieux prétendant! Trônant sur son rocher en contrôle de lui-même, le maître gerfaut inspire le respect. Tour à tour, nous l'admirons tout en étudiant son plumage. Pour nous c'est un véritable cadeau puisque habituellement, cette espèce se voit souvent de très loin et ne demeure pas en place très longtemps.

Le faucon érige soudain son corps et hoche de la tête. Je prends aussitôt un clip, car je me doute qu'il va s'envoler bientôt. Dans les secondes qui suivent, il défèque et d'un élan explosif, il s'envole en direction de l'Anse-aux-Foins. La cadence de son vol est régulier, mais vous dire la puissance des battements d'ailes! Il faut le voir de ses yeux pour constater comment ce faucon est puissant et extrêmement rapide lorsqu'il se déplace. Soudain, un groupe de Plectrophanes des neiges s'envole en catastrophe et le gerfaut se pose à nouveau sur un rocher. Cependant, il est loin.


 Le vol du faucon (vidéo de Claudette Cormier)


Le Faucon gerfaut sur le rocher au loin

Les yeux plissés par le vent cinglant, Germain me regarde. Il se penche vers moi et tremblotant, il demande : « Et si on allait déjeuner au restaurant? » Sans me faire prier une seconde de plus, je me lève. Je salive déjà à penser que je vais déguster un bon café bien brûlant tout en me tapant un bon déjeuner avec lui. Cela fait deux heures que nous sommes levés et que nous n'avons rien mangé ou ingurgité. À ce stade, le froid sibérien a eu raison de nous. Les doigts crochis par le froid, les pieds gelés, le corps frissonnant, nous partons avec le coeur réchauffé par cette rencontre inusitée d'un Faucon gerfaut, prince de l'Arctique.

lundi 18 novembre 2013

Les oiseaux mal-aimés et l'oiseau admiré

« Où vas-t-on demain, Clo? » Germain me demanda. Je répondis : « Hmmm... je ne sais pas trop... au Lac peut-être? Mais ça risque d'être tranquille. Dormons là-dessus et on se reparlera demain matin, d'accord? » Le dimanche 17 novembre 2013 au lever, c'était encore ambiguë dans ma tête. En fait, mes antennes sont encore « molles ». Cette expression, qui a beaucoup fait rigoler Germain et nos amis de La Baie, veut dire que je n'ai pas reçu d'informations spécifiques, de fortes attirances pour un secteur donné ou alors pour trouver une espèce particulière. C'est la petite voix intérieure. Bref, j'y vais plutôt avec la logique aujourd'hui. Puisque La Baie et Saint-Fulgence ont été couverts hier par les ornithologues, nous optons finalement pour le Lac Saint-Jean. Comme j'aime bien me fixer un but, allons vérifier s'il n'y aurait pas un Harfang des neiges dans ce secteur.

Une heure plus tard, nous voilà rendus à Saint-Bruno. Notre premier arrêt s'effectue à la coopérative agricole. Cet endroit peut abriter des Plectrophanes lapons à cette période de l'année. En même temps, les silos des fermes qui se voient au loin font d'excellents postes de guet pour les harfangs, que nous vérifions à partir de ce site. Mais très rapidement, ce sont les Moineaux domestiques qui attirent notre attention. Avec le redoux d'aujourd'hui, les mâles chantent gaiement, ce qui plaît à nos oreilles. Les oiseaux sont posés sur toutes sortes de structures anthropiques avoisinants le silo de la coopérative. Le plus discrètement possible, nous stationnons la voiture près d'eux. Nous demeurons dans le véhicule afin que je puisse profiter de l'occasion pour faire quelques séquences vidéos. Par la suite, nous nous sommes mis à parler de cette espèce qui, malheureusement, se voit de moins en moins dans la région. Le même phénomène se vit au Québec, l'espèce étant fortement en déclin. Il y a des localités où l'espèce a complètement disparu, comme c'est le cas à Saint-Fulgence. C'est tellement dommage! Ça nous rend bien triste lorsqu'on y songe. Et comme cette espèce est plus ou moins aimés par les gens en général, voir indifférent à son égard, leurs chances de survie dans le temps ne tient à pas grand chose. Dans le fond, qui se préoccupe des vulgaires moineaux? En filmant ces oiseaux, je me suis dit qu'un jour, ces clips seront peut-être historiques. Et si cette espèce allait éventuellement disparaître de la carte de la région dans 50 ans?

 Moineau domestique, un beau mâle


Moineau domestique, une jolie femelle

Soudain, nous repérons six Vachers à tête brune immatures parmi les moineaux! Nous sommes toujours content d'observer des vachers. Dans le même sens, cette espèce est en forte régression, dans notre région du moins. Il y a vingt ans, il était régulier de voir des groupes de vachers se déplaçant par centaines à la fois, comme des étourneaux. Aujourd'hui, il faut les chercher et lorsqu'on en voit, c'est souvent dix individus et moins en même temps. Encore une fois, les vachers n'ont pas la cote d'amour auprès de la population. Personne ne s'en soucie vraiment. Cette espèce est devenue rare au Saguenay–Lac-Saint-Jean. Fait inusité, il est plus facile de trouver un Pygargue à tête blanche que d'observer un Vacher à tête brune en 2013! Avec émerveillement, je prends également un clip d'un vacher, celui qui est le plus près de moi. Aujourd'hui, je suis un témoin visuel que ces deux espèces mal-aimées existent encore, mais en petit nombre.


 Vacher à tête brune immature avec un moineau

Lorsqu'on a fait le tour du site de la coopérative, nous reprenons la route 170. Sur cette route, je vois soudainement quelques dizaines d'Étourneaux sansonnets qui s'alimentent avec avidité dans un fossé, ce dernier encore très verdoyant pour un mois de novembre. Je demande à Germain de garer la voiture sur l'accotement. Je suis peut-être la seule, mais j'adore regarder les étourneaux. Il faut croire que j'ai le béguin pour les mal-aimés... À cette période de l'année, leur plumage est constellé de petits points blanchâtres et les plumes de leurs ailes sont lisérées d'une belle bordure fauve intense. Lorsque le soleil brille, leur plumage irise les couleurs d'un arc-en-ciel! Même si cet oiseau n'a pas un physique aussi attrayant comme celui du Merle d'Amérique par exemple, je le trouve très beau. On s'entend pour dire que l'étourneau n'est pas une espèce menacée, mais est-ce une raison pour ne pas l'observer et l'admirer?


Groupe d'Étourneaux sansonnets


Les étourneaux qui s'alimentent


Une brochette d'étourneaux

Patrouillant le reste de la route 170 à Saint-Bruno, nous effectuons des arrêts successifs afin de scruter aux jumelles chaque poteau et chaque piquet de clôtures dans le but de trouver un harfang. À notre grande surprise, les champs sont vides d'oiseaux à part quelques Grands Corbeaux (que j'adore aussi).  Mais, voyons donc... Même pas une Buse pattue? Mais où sont ces buses, ma foi? Pfff! Le désert... Nos pensées se bousculent un peu. Peut-être aurions-nous dû rester au Saguenay pour observer aujourd'hui? Bon. Puisque nous sommes là, essayons d'être plus positifs et productifs.

Les champs ici n'ont rien donné. Nous devons décider de notre prochaine destination : Hébertville, Saint-Gédéon ou Métabetchouan? À l'intersection où il y a des feux de circulation, Germain demande mon avis : « Veux-tu prendre cette route ou bien prendre un rang vers Hébertville? » Indécise et en haussant les épaules, je pointe du doigt la route qui mène à Saint-Gédéon, mais sans grandes convictions. Nous poursuivons alors notre chemin sur  la route 170. Nous nous arrêtons à nouveau près des champs labourés pour chercher le hibou blanc qui brille par son absence. Encore rien. Soudain, Germain me suggère de prendre un certain rang, puisque l'année dernière, il y avait eu des Alouettes hausse-col et des Plectrophanes lapons. Nous effectuons donc un virage serré et nous empruntons le rang 3 qui est toujours dans les limites de Saint-Bruno.

Un arrêt par ici, un arrêt par là... Rien. Les champs sont toujours vides. Il n'y a que le vent qui sifflent dans nos oreilles. Un peu déçus, nous effectuons l'un des derniers arrêts dans ce secteur avant d'aller dîner à notre camp de base. Il s'agit d'un restaurant à Saint-Gédéon que nous fréquentons depuis 25 ans, minimum! Sans farce! Restant dans la voiture à cause du vent qui me gèle, j'effectue un « scan » aux jumelles au-dessus des labours. Hmmm? C'est quoi ça? Un pigeon bariolé? Je demande à Germain de vérifier avec moi cet oiseau immobile dans le creux d'un labour. Au préalable, il pensait que c'était un déchet, puisqu'il y a plusieurs papiers polluant le champ. Soupir. Puis, il y a un moment de silence... Ensuite, Germain rétorque d'une voix allumée : « Hé! Est-ce que ça pourrait être une Mouette de Franklin? » Nous regardons à nouveau l'oiseau  niché discrètement dans le sillon. Sapristi! C'est bel et bien une Mouette de Franklin! Réveillés de notre torpeur, nous ne savons plus quoi utiliser  dans les optiques : les jumelles encore? Le télescope? Les caméras? Ce sera la preuve d'abord! Nous prenons des photos et des clips. Puisque la mouette est coopérative, nous admirerons son plumage plus tard. Mais nous savons déjà que c'est une immature de premier hiver. Eh bien, dîtes donc! Finalement, ce sont les antennes de Germain qui étaient redressées tout à l'heure et les miennes étaient encore molles!

La Mouette de Franklin immature (photo de Germain Savard)

Dans l'heure qui suit, nous observons la mouette sous toutes ses coutures. Bien souvent, elle demeure immobile dans les labours et ne fait rien de particulier. Par contre, par moments, l'oiseau s'envole sur quelques pieds et pique au sol sans crier gare pour gober quelque chose gisant sur la terre humide. Les chances sont que ce soit des vers de terre. Pendant qu'elle effectue des pirouettes aériennes, nous remarquons que la mouette laisse pendre ses pattes lors de son envol. Au début, nous croyions qu'elle était blessée, mais lorsqu'elle se pose sur les labours, elle se tient bien droite sur ses pattes. Nous sommes venus à la conclusion que l'argile mouillée des labours lui collait aux pattes et que durant son vol, c'était trop lourd pour qu'elle les ramènent sous sa queue. Notre hypothèse s'est avéré vrai alors que plus tard durant notre sortie, nous avons vu un Goéland arctique  victime du même sort. Des boules d'argiles mouillées visibles aux jumelles étaient collées aux pattes chez le goéland en vol.


 La Mouette de Franklin immature


La mouette qui s'alimente avec les pattes pendantes


Goéland arctique immature avec des pattes pendantes

Finalement, la mouette s'éloigne de plus en plus avec ses épisodes de vol dans le but de s'alimenter. Elle est maintenant au beau milieu du champ et inaccessible pour une séance de photo supplémentaire. Sur de longs moments, elle ne fait rien de particulier. La mouette se repose et digère. Ayant faim nous aussi, nous nous rendons à notre restaurant préféré pour un dîner très tardif ou un souper hâtif, c'est selon. Nous nous souviendrons très longtemps de cette journée et de cette découverte très inattendue. Morale de l'histoire : aiguisez vos antennes et explorez votre environnement même quand tout semble perdu d'avance. On ne sait jamais. Sinon, prenez du temps afin d'admirer les espèces d'oiseaux mal-aimés qui, dans un avenir rapproché, pourrait disparaître plus rapidement qu'on ne le pense.

lundi 11 novembre 2013

La quête des oiseaux de proies

Nous sommes le 9 novembre. La veille, je m'étais informée des systèmes météorologiques en place ainsi que des prévisions à court terme avec les médias. Mon plan de match s'est cristallisé. Aujourd'hui, nous irons à La Baie afin d'observer les oiseaux de proies. Pas n'importe lequel... les pygargues et les aigles. C'est ma spécialité. De bonne heure, nous quittons notre demeure à Saint-Fulgence. Nous allons avant tout nous taper un déjeuner costaud au restaurant du coin. Toasts, oeufs, bacon, saucisses et fèves au lard au menu. Avec un merveilleux café bien sûr. C'est que ce ne sera pas facile aujourd'hui de tenir bon au froid sur le terrain. Ça nous prendra beaucoup de calories pour contrer les éléments de la nature. En effet, il y a de forts vents du nord-ouest qui soufflent entre 30 et 50 kilomètres/heure. À l'automne, les rapaces aiment ces vents. C'est plus facile pour eux de s'élever et de voyager avec le vent dans le dos. Depuis un bon moment, les systèmes n'ont pas été favorables pour la migration des oiseaux de proie. Puisqu'il y a une fenêtre ouverte dans le temps aujourd'hui, je m'attends à vivre un bon recensement, surtout des pygargues, puisqu'au mois de novembre, ces gros rapaces migrent en bon nombre. Au nord, la neige est présente ce qui devrait les inciter à migrer.

Voilà, c'est fait. Nous nous sommes tapés un bon repas copieux. L'estomac repu, bourrés de calories, Germain et moi nous dirigeons vers La Baie. Cela prend environ une quarantaine de minutes pour s'y rendre à partir de Saint-Fulgence. C'est pour moi un supplice d'être patiente en attendant d'arriver. Faire du rapace pour moi est un réel bonheur et je voudrais déjà être sur place en claquant des doigts. Mais... nous serons à La Baie vers 9h.

Nous empruntons le boulevard Saint-Jean-Baptiste. Pendant que Germain conduit, je regarde le ciel au cas où je verrais un rapace en migration. Soudain, un mouvement attire mon attention à ma droite. Volant au-dessus d'un champ le long de la route, je détecte un hibou! Au début, je croyais avoir affaire à un Harfang des neiges. « ARRÊTE, GERMAIN! ». Due à la tonalité de ma voix, Germain freine illico et se gare sur l'accotement faisant lever un nuage de neige. Un moment de silence passe pendant que je braque mes jumelles sur le hibou. Oh! C'est un Hibou des marais! De toute urgence, nous sortons du véhicule pour l'observer davantage. Avec son vol papillonnant, le hibou se déplace très rapidement puisqu'il a une escorte de corneilles qui le talonne et qui s'époumone pour le faire déguerpir. Puisque le Hibou des marais est en déclin depuis un certain nombre d'années, nos observations de cette espèce dans la région sont toujours très appréciées. En quelques secondes, le hibou traverse la route, passe devant nous et disparaît rapidement de notre champ de vision. Heureux de cette rencontre avec cet oiseau, nous poursuivons notre route vers La Baie. Hé-Hé! Nous y sommes presque!


 Hibou des marais en vol

Après avoir franchi tous les feux de circulation et après avoir enduré la lenteur du trafic, nous voilà rendus sur le stationnement du Musée du Fjord. Aussitôt sorti du véhicule, nous constatons que le vent est vraiment vif et mordant. C'est toujours plus froid ici. Non! Que dis-je? C'est toujours plus frette à La Baie, l'endroit étant un corridor naturel où le vent s'engouffre. Puis s'ajoute l'humidité du mois de novembre sur le bord de l'eau. Habillés au maximum, mes bras ne touchent plus mes flancs, comme on le voit parfois chez un culturiste surdéveloppé. Je porte sur moi un T-shirt, un gilet col-roulé, un gilet épais en laine, un foulard et une grosse doudoune.

À première vue, tout m'a l'air tranquille dans les alentours. La piste cyclable est complètement vide de monde et les battures sont désertes à part une poignée d'Oies des neiges qui s'alimentent devant nous. Quand je pense qu'il y a deux semaines, nous étions dans l'ivresse des oies et de leur cacophonie. Eh bien! Elles ont fini par migré.


Une piste cyclable vide


Ce qui reste des Oies des neiges


La marche des Oies des neiges

Ah! Voilà nos amis Serg Tremblay et Hugues Simard qui arrivent, étant avisés au préalable. Les optiques sont installés et après nos salutations chaleureuses, on se met tous aux jumelles pour scruter le ciel à la recherche des Pygargues à tête blanche et des Aigles royaux. Dans la demi-heure, Serg s'écrie : « Un pygargue adulte! » Et les festivités commencent...

En novembre, La Baie est tout prescrit pour l'observation des oiseaux de proie, en particulier les pygargues et un peu moins les aigles, puisque ces derniers ont plutôt migré en octobre. Les rapaces qui arrivent du nord franchissent la chaîne de montagnes des Monts-Valin qui ceinture le nord de la région. Les pygargues traversent ensuite la rivière Saguenay et survolent d'autres montagnes avant de traverser les eaux de la baie jusqu'à nous. C'est là que nous les attendons alors que ceux-ci s'élèvent pour prendre de l'altitude. Après leurs traversées, les pygargues et les aigles poursuivent leur route vers la réserve faunique des Laurentides en direction du sud. Croyez-moi! Ces montagnes sont un pur bonheur pour les amateurs d'oiseaux de proie comme moi. Par contre, un télescope est essentiel pour leurs identifications à longue distance.


Serg et Germain au travail


Hugues et Germain qui jasent


La baie lors de la marée basse (ilet à gauche)


Le bonheur : les montagnes qui accueillent les rapaces


La chaîne des Monts-Valin enneigée derrière

Au bout de quelques heures, nous commençons tous à geler. Serg sent le froid franchir une à une ses vertèbres et frissonne. Hugues lui, commence à greloter. Quant à Germain et moi, nous avons froid aux pieds. Pour nous réchauffer, nous effectuons quelques pas de danse discrets entre des séances de jumelles.

« Pygargue adulte! » criais-je. Encore un. Nous nous délectons à le voir voler et migrer près de nous. Nous poursuivons ainsi, à faire des vérifications régulières aux jumelles en bavardant de temps en temps, la tête rentrée dans les épaules à cause du vent froid. À l'heure du midi, Hugues nous quitte, le corps grelottant. Et pour cause! On se sent comme dans l'Arctique. Ainsi, un vénérable soldat est tombé. Nous continuons les observations avec Serg. Cependant, le temps froid, venteux et humide grugent de plus en plus nos énergies et siphonnent nos précieuses calories.

Vers 13h, nous avons en cumulatif  huit pygargues (deux adultes et six immatures) en migration! Pas d'aigles aujourd'hui. C'est au tour de Serg de nous quitter maintenant. Les pieds qui gèlent sont meurtriers pour le reste du corps qui n'arrive plus à se réchauffer. Une heure après, n'en pouvant plus non plus, c'est à notre tour de trouver refuge pour se réchauffer. Même que, Germain faisait un début d'hypothermie. Il grelotte sans pouvoir se contrôler. Quant à moi, mes rotules d'épaules surchauffent et brûlent littéralement à cause des efforts soutenus, ayant toujours les bras relevés. Ainsi, nous nous ruons au restaurant pour manger, boire des breuvages chauds, enlever nos bottes et se réchauffer! Vous dire que La Baie en novembre est traitre pour le froid, c'est peu dire!

Malgré ces inconvénients, nous sommes très heureux de notre journée avec tous nos pygargues en poche. Cependant, rien n'a été acquis. Nous avons fait des efforts à la limite de nos capacités physiques. Le bedon bien remplie, le corps réchauffé, le rose revenant sur les joues, nous partons de La Baie pour retourner dans notre havre à Saint-Fulgence. Ce fut une magnifique journée!


Un Pygargue à tête blanche immature en migration

dimanche 27 octobre 2013

Une pause

Rendu à la fin octobre, nous sommes définitivement en période de transition vers l'hiver. Il fait de plus en plus froid et la lumière fuit rapidement lorsque l'heure du souper arrive. Puis, j'ai vu mes premiers flocons de neige cette semaine, mais qui ont vite fondu par la suite. Et durant cette fin de semaine, le mauvais temps se poursuit et nous a laissé qu'une matinée pour observer les oiseaux. Il semble que cette période nous incite discrètement à l'intériorisation...

Cette semaine, j'ai le goût de vous amener au coeur de mon âme. Cela se fera par mes écrits poétiques et par la visionnement  de centaines de photographies de nature que j'ai prise et qui vous attendent sur mes deux sites. Vous me feriez une fleur d'aller lire mes poèmes et d'aller regarder mes photographies. Ce sont des vitamines pour les yeux qui, je l'espère, rempliront votre coeur. Je vous ouvre la porte et vous invite chaleureusement. Merci.

Poèmes genre haïku : www.fruitsducormier.blogspot.ca


Un coucher de soleil mystérieux que j'ai prise de chez moi

lundi 21 octobre 2013

Blanc comme neige

Rassurez-vous... ce n'est pas moi qui est blanche comme neige. Il n'est pas non plus question de peur ou d'épouvante avec l'approche de l'Halloween. Il s'agit plutôt de blanc comme Oies des neiges. Eh oui, nous n'avons pu résister de retourner à La Baie lors du 19 octobre 2013. Germain et moi avons pris la route tôt ce matin vers cette destination, mais un peu avec hésitation puisqu'il pleut des averses. Cependant, plus nous nous approchons de La Baie, plus la pluie devient éparse. Au bout de quarante-cinq minutes, nous sommes arrivés dans le secteur du Musée du Fjord à Grande-Baie où deux Urubus à tête rouge nous survolent en comité d'accueil. Voilà qui nous donne espoir. Si les oiseaux migrent malgré le plafond bas, c'est que bientôt, le temps va se réparer. Aussitôt, nous téléphonons à nos amis de La Baie qui viennent nous rejoindre illico. Après nos salutations chaleureuses, les hommes proposent que l'on marchent jusqu'au bout du quai afin d'avoir une meilleure vue sur les oies qui s'alimentent pendant la marée basse. Ainsi, nous nous rendons joyeusement au bout du quai où des trésors ailés nous attendent...


Paysage de la baie


Le quai de Grande-Baie


Aussitôt rendus au bout du quai, nous nous affairons à observer chaque volatile. Ce n'est pas si facile puisque nous sommes confrontés aux forts vents d'ouest qui soufflent. Et si par malheur il y a un trou dans le veston, on le sait tout de suite à cause du froid qui rentre et qui nous frigorifie sur le champ. Face aux intempéries, nous sommes contents d'être vêtus de nos doudounes, tuques, foulards et mitaines. Et comme nous effectuons de l'observation sur place, toutes les conditions sont réunies pour que l'on gèle. Revenons à notre excursion. Nous sommes accompagnés de nos amis Serg Tremblay et de Hugues Simard. Pendant que les hommes cherchent d'autres espèces d'oies et repèrent des colliers jaunes avec codes alphanumériques sur les oies pour Serg qui les prends en note, moi, je m'affaire à rechercher des aigles ou fait des vidéos d'oies lorsque le moment s'y prête.


Les trois ornithologues occupés


À la recherche de colliers jaunes chez les oies


Notre ami Hugues Simard concentré


Serg et sa grosse caméra (n'est pas un télescope!)


Oies des neiges à l'ouest du quai


Oies des neiges à l'est du quai

Chacun étant dans sa bulle, nous poursuivons nos observations. Le vent transporte à nos oreilles les cris d'oies qui crient sans cesse. Et comme la marée commence à monter, nous sommes de plus en plus entourés d'oies. Il est impossible pour moi de décrire en mots toute la beauté de ces oiseaux et de l'effet que cela donne lorsqu'elles sont réunies en une énorme masse blanche. Des anges blancs... un peu bruyants certes, mais d'un blanc éclatant qui jette un coup de lumière vif sur les rives de la baie. Pendant toute la journée, des volées d'oies arrivaient en grande pompe, criant à pleins poumons, arquant leurs ailes pour casser leur vol et atterrir en se balançant. Mon dieu que c'est beau, beau, beau!


Hallucinantes oies!

Nous étions bien ensemble ce matin, seuls au monde au bout du quai, dans le vent et dans ce froid de canard en compagnie des oies. Par contre, à cause de la marée montante, nous nous sommes déplacés et nous sommes retournés sur la piste cyclable, car les oies étaient plus près du rivage. Et là, en début d'après-midi, le soleil est sorti en faisant des clins d'oeils derrière les nuages, nous apportant un peu de chaleur. Cependant, le soleil a également fait sortir les gens qui étaient de plus en plus présent. Oh, bien sûr... il y a eu d'autres Ti-counes ainsi que des aéronefs qui ont fait paniquer les oies. Soupir. Que faire pour qu'ils comprennent que leurs égoïsme dérangent les oiseaux en repos? Une aspirine quelqu'un, s'il vous plaît.


 Dérangement par un hélicoptère

Afin de vivre une magnifique journée malgré les irritations, je me retire dans mon for intérieur. Me concentrant sur la recherche d'aigles, je n'entend plus la cacophonie des oies ni la cacophonie des gens qui s'amassent autour de nous. Il est vrai qu'une série de télescopes érigées sur la piste cyclable est bien tentant pour les curieux qui passent à tour de rôle. Pour une solitaire comme moi, c'est difficile d'observer dans ces conditions. J'ai l'impression d'être près d'un centre d'achats où les gens accourent pour venir voir ce qu'il y a d'intéressant. Je ne suis pas là pour animer un groupe, je suis là pour chercher des aigles! C'est mon loisir à moi! Foutez moi la paix enfin! Heureusement, Serg et Germain se sacrifient et répondent aux questions des gens et leur montrent des oies dans leurs télescopes pour les contenter.

Nous avons passé la journée entière derrière le musée. Nous avons estimé le nombre des oies à 20 000 aujoud'hui! Dans le lot, une Oie de Ross a été repérée, trois Bernaches de Hutchins étaient aussi présentes. Il y avait une vingtaine d'oies portant des colliers jaunes pour Serg et à mon grand plaisir, j'ai trouvé un Faucon pèlerin et deux Aigles royaux en migration, ma récompense!


Une jolie Bernache de Hutchins


Oie des neiges portant un collier jaune : la TK78


Une Oie des neiges juvénile


Oie des neiges adulte de forme bleue


Ma récompense : un Aigle royal!

Il est environ 16h30 et la journée tire à sa fin... La lumière baisse drastiquement. Tranquillement, nos amis nous quittent. Le monde aussi. La piste cyclable se vide. Il n'y a que les oies qui continuent à crier. Pendant que la marée monte à vue d'oeil, presqu'aux deux minutes, des groupes d'oies s'envolent vers les champs alors que d'autres arrivent sur les lieux. Plus haut encore dans le ciel, de nombreuses volées d'oies filent plein sud et migrent. Ayant passé la journée dehors, accompagnée d'une amie commune, nous allons déguster un bon repas chaud bien mérité au restaurant. Finalement, nous quittons La Baie, les sens émoustillés par les magnifiques images et les sons d'oies qui nous ont résonné dans la tête durant toute la soirée. C'est vrai. Lorsque c'est devenu silencieux dans la maison, j'entendais en sourdine la cacophonie des oies. Germain aussi. J'ai ouvert la porte en pensant qu'il y avait peut-être une horde d'oies qui jacassait sur la rivière Saguenay en face de chez moi à Saint-Fulgence. Mais non, le son venait de mon esprit! Cela m'a impressionnée... À nouveau, nous avons vécu une merveilleuse rencontre avec nos amis, avec ces belles Grandes Oies des neiges et mes Aigles royaux chéris. L'abondance existe.


En fin de journée, la marée blanche

mercredi 16 octobre 2013

La Baie et l'Action de grâce

En cette fin de semaine de l'Action de grâce, Germain et moi sommes retournés à La Baie afin d'observer les Oies des neiges ainsi qu'une Oie rieuse qui a été découverte par notre ami Serg Tremblay. Des oies, il y en avait des milliers! Pour notre région, ce phénomène est grandissant; c'est-à-dire, que les Oies des neiges font halte chez nous que depuis une vingtaine d'années seulement. Et plus ça va, plus nous en avons. Pour vous donner une petite idée, il y a trente ans, les oies ne se posaient aucunement dans notre région. La seule façon pour en voir à cette époque étaient de les recenser en vol lors de leurs migrations. Si un groupe d'oies (de 50 à 100 individus) se posait sur le lac Saint-Jean ou sur la rivière Saguenay à cause du très mauvais temps, nous nous téléphonions l'un et l'autre (pas d'ordinateur dans ce temps-là) pour annoncer aux observateurs la présence inusitée de cette espèce sur le territoire du Saguenay-Lac-Saint-Jean. Très rapidement, nous nous déplacions pour aller voir cette « manne blanche ».

Eh bien! Les choses ont changé depuis, c'est le moins que l'on puisse dire. Maintenant, il est commun de recenser entre 15 000 et 50 000 individus! En ne parlant que de La Baie, il semble qu'une certaine population d'oies ait adopté les battures dans cette localité afin de profiter de la richesse des racines et des tubercules de plantes marines enfouies dans l'argile et surtout pour s'y reposer. D'année en année, nous assistons à ce phénomène d'oies qui grandi sans cesse. Pour les gens du coin et d'ailleurs, les rives de La Baie sont en train de se transformer en un petit Cap Tourmente. Les gens se ruent pour observer les milliers d'Oies des neiges qui vont et qui viennent incessamment selon le jeu des marées. Une marée basse, une marée d'oies apparaît. Et comme les oiseaux sont de plus en plus à l'aise à cet endroit et tolèrent la présence humaine, tout porte à croire que La Baie sera très achalandé dans les années futures. Même que, c'est devenu un problème pour les autorités locales puisqu'ils reçoivent de plus en plus de plaintes dues au dérangement des oies par certaines personnes irrespectueuses. La loi sur la protection de la faune devra être regardée de plus près et des problèmes devront être réglés pour éviter ce genre de perturbations qui sont récurrentes. Peut-être que les élus devront ériger des clôtures éventuellement. Et les kite-surfers eux aussi devront être avisés pour mieux délimiter leur territoire pour voguer sur les eaux de La Baie sans déranger les oies. Bref, tout est encore en ébullition et en ajustement.


Volées d'Oies des neiges


Un Ti-coune pris sur le fait

Je reviens donc à notre merveilleuse journée du 13 octobre 2013 qui n'était que pur émerveillement. La cacophonie des oies qui sont à nos pieds, les vas-et-vients des volées par centaines à la fois a de quoi nous clouer sur place. La beauté des oiseaux est incontestable à chaque coup de jumelles que nous donnons sur les groupes d'oies. Nous observons aussi les nombreuses interactions entre les groupes familiaux alors que les adultes protègent farouchement leur progéniture en leur assurant un petit coin pour manger. Les oiseaux cris, s'alimentent, se chicanent, se pincent les plumes et volent. Devant nous, des volées d'oies se posent en douceur, freinées par les forts vents d'est qui semblent les suspendre dans les airs comme des cerfs-volant. De toute beauté! Nous avons l'impression d'être dans un documentaire et vivons intensément chaque minute de béatitude. Sur la piste cyclable derrière le musée du Fjord, les gens qui déambulent en continue s'arrêtent, observent et photographient les oies. Pour un moment dans la journée les conflits cessent pendant que collectivement, nous nous émerveillons.

Je salue La Baie en cette fin de semaine de l'Action de grâce ou justement, il est bon de remercier le Ciel pour tant d'abondance! Une manne blanche ailée sur les battures qui nous a certes rempli le coeur d'émerveillement et de beauté!


Un temps d'arrêt sur la piste cyclable


Une vue d'ensemble des oies sur les battures




Elles arrivent!


 Oies qui tapent des pattes pour ramollir l'argile


 Une belle tête d'Oie des neiges

vendredi 4 octobre 2013

Brume d'Angleterre

Durant la fin de semaine dernière, soit le 29 septembre 2013 dernier, Germain et moi avons le goût d'effectuer une excursion aux passereaux. De toute façon, la brume est si dense que nous ne pouvons en aucun cas faire de l'aquatique. Où aller? Germain propose la halte routière Valin à Canton-Tremblay située à quelques kilomètres de notre résidence. C'est d'accord pour ce site! En roulant en voiture, nous devons ralentir la vitesse de croisière, le brouillard nous empêchant de voir loin devant. Enfin! Nous voilà rendus à la halte routière. Hummm... Soudain, un petit doute m'assaille et je me demande si nous allons voir les passereaux finalement.


Voici la halte routière


La vue sur la rivière Saguenay


Un Goéland à bec cerclé seul dans la brume

Avec ce doute en tête, nous empruntons tout de même le sentier qui longe la rivière Saguenay qui abrite une forêt mixte et de nombreux fourrés d'arbustes. Nous marchons sur des tapis de feuilles mouillées et le seul son que nous entendons à part nos pas sont les feuilles qui tombent des arbres. Ouais! Pas fameux jusqu'à date. Nous poursuivons le petit chemin de terre qui est passablement rongé par l'érosion à certains endroits. Puis nous entendons des petits cris d'oiseaux au loin. Il y a au moins des Mésanges à tête noire, des Roitelets à couronne rubis et des Bruants à gorge blanche. Bien beaux ces oiseaux, mais nous aimerions que ça brasse un peu plus. Bon sang! Cette brume nous colle à la peau.


Une partie du sentier


Germain qui observe des passereaux


La canopée embrumée


Arrivés au bout du sentier, nous nous regardons. Le regard complice entre nous a tout dit. Pas fort ce matin, hein?. Nous rebroussons chemin à l'inverse. Une excursion bien courte faut-il le préciser... Sur le sentier, nous entendons soudain des cris d'Oies des neiges qui volent dans la brume au-dessus de nos têtes. Sapristi! Ont-elles un radar pour circuler dans cette nappe brumeuse? On n'y voit strictement rien.


Oies des neiges volant dans la brume


Dans le petit chemin, nous voyons quelques passereaux circuler entre des bosquets. Bon, enfin! Nous allons pouvoir nous exercer un peu avec nos jumelles. Roitelets, d'accord... Voilà d'autres mésanges. Ah? Des parulines et d'autres bruants. Et celui-ci? Oh! Un Viréo à tête bleue! Sur la pointe des pieds, je m'avance vers lui et prend un petit clip. Contents d'avoir au moins vu ce viréo, nous mettons fin à notre excursion à cet endroit. D'un pas plus rapide, nous nous dirigeons vers le stationnement.


Le Viréo à tête bleue


Notre gros soleil de ce matin


Germain qui m'attend au stationnement


Pour moi, la brume de ce matin me rappelle les films d'épouvantes où l'on aperçoit dans les forêts d'Angleterre cette couche épaisse blanchâtre et humide. Chaque son ou chaque mouvement dans la forêt devient une menace potentielle où un zombie peut apparaître à chaque instant. Une feuille qui tombe bruyamment tout près peut nous faire sursauter d'horreur. L'ambiance porte à cela et nous confronte à nos peurs. Pouf! Je sors de mon scénario mental et reviens subitement sur terre. La vraie peur réside sur la route Tadoussac alors que nous apercevons à la dernière seconde les voitures qui passent. Prudemment, nous nous dirigeons vers Saint-Fulgence.


La route Tadoussac

Nous tentons notre chance sur la piste cyclable en espérant y recenser plus de passereaux. Sur le stationnement, clac! clac! Nous fermons les portières du véhicule et écoutons les environs. Pas un son, pas un cri d'oiseau... Pff! J'ai bien l'impression que nous serons quitte pour prendre une autre marche de santé. Et cette brume! Va-t-elle finir par sublimer celle-là?


La piste cyclable dans le brouillard


Nous parcourons la piste cyclable et disparaissons dans la brume et dans le silence. Un arrêt par ici, un arrêt par là... Vraiment, la faune ailée brille par son absence. Nous avons beau fouiller chaque bosquet, écouter le long du marais de Canards Illimités, nous demeurons pénard. Le désert total... Bon, d'accord. Il y avait quand même quelques mésanges, geais, parulines et bruants, mais rien pour contenter nos âmes d'ornithologues. Cependant, il y une chose qui nous a vraiment impressionnés ce matin. Ce sont la multitude de toiles d'araignées. Je n'ai jamais vu autant de toiles d'araignées de ma vie! Visible par la rosée, elles étaient partout, seules ou en groupes, au sol ou accrochées après les branches d'arbres. La petite brise faisait bouger ces beaux tricots argentés, perlés de gouttes d'eau. Émerveillée devant ces capteurs d'insectes, j'ai oublié ma frustration de ne pas observer des oiseaux. C'était vraiment beau!


Groupe de toiles d'araignées


Une des jolies toiles

L'heure du midi arrive et bien franchement, notre liste d'espèces d'oiseaux est loin d'être satisfaisante. Nous rebroussons chemin un peu déçus de ces deux excursions manquées où nous n'avons guère levés nos jumelles. Mais comme on dit, une fois n'est pas coutume! Alors que nous sommes sur le point de quitter la piste cyclable, un rayon de soleil perce enfin la brume, comme pour nous taquiner avec un clin d'oeil. Pff! En voilà des manières! Lorsque nous arrivons à la maison, la brume d'Angleterre s'est complètement volatilisée pour laisser sa place à un soleil magnifique! Ah! Parfois, la nature a le don de nous jouer de vilains tours! Mais ce sera partie remise.


Un rayon de soleil qui perce la brume