Par Claudette Cormier

lundi 29 août 2011

Au cœur des limicoles

En cette fin du mois d’août, Germain moi avions très hâte de parcourir la plage à l’embouchure de la rivière Belle-Rivière à Métabetchouan. Ce lieu est sacré pour nous en tant qu’ornithologues, car ce site est utilisé comme aire de repos par les oiseaux migrateurs. À l’automne, lorsque les nicheurs de l’Arctique migrent en direction du Sud, l’embouchure de la Belle-Rivière sert d’aire de repos et de ravitaillement. À différents moments de la saison, les observateurs peuvent observer des canards de mer, des limicoles, parfois des labbes, des mouettes, des goélands et des sternes. Cependant, comme bien des endroits au Québec, les sites ornithologiques se détériorent à vue d’œil. Cet état de fait est causé par la faune humaine qui cherche à développer l’environnement pour entre autres créer des attraits touristiques. Malheureusement, cela se fait au profit des sites ornithologiques et des oiseaux qui n’ont plus accès à leurs aires de repos qui sont rendus extrêmement perturbés. Nous pouvons accuser ici l’ignorance, la négligence ou même l’indifférence. Si je m’en tiens à l’embouchure, Germain et moi avons régulièrement visité l’embouchure depuis vingt ans. Auparavant, nous n’avions affaire qu’à des baigneurs ou des marcheurs matinaux qui déplaçaient les oiseaux sur leur passage. Maintenant, les véhicules tout-terrain, les motocyclettes et même des voitures du genre « pick-up » côtoient les marcheurs sur cette petite parcelle de plage. S’ajoute également au portrait les sports aquatiques à voiles et à parachutes pour tuer l’endroit en question. Puisque ce site n’est pas officiellement reconnu par les autorités, les gens s’approprient chaque parcelle de la plage pour exploiter ce lieu comme terrain de jeux. C’est désolant et décourageant devant l’ampleur du phénomène humain destructeur. La migration des limicoles commence en juillet, mais ce n’est qu’à la rentrée scolaire que la plage se libère enfin. Les oiseaux doivent trouver refuge ailleurs, on ne sait trop où. Germain lui est allé seul en août à l’embouchure à deux reprises. Malgré qu’il se soit rendu sur les lieux tôt en matinée, il est revenu à la maison, enragé. Trop de dérangement et d’agitation sociale. Un site en déperdition. Voilà le portrait juste d’une très triste réalité.

Revenons à notre journée passée à l’embouchure… Ce jour-là fut spécial puisque le soir, nous attendions les frasques de l’ouragan Irène qui est sur le point de faire son entrée dans la région. Par contre, pour le moment, il fait beau. Arrivés sur les lieux, nous jetons un coup d’œil vers l’embouchure. Tout semble mort. Mais au moins, nous sommes seuls sur la plage. D’un pas paresseux, nous avançons vers la pointe de sable. À notre gauche, nous empruntons les berges du lac Saint-Jean et à notre droite, nous apercevons cette lagune qui parfois se dessèche.


Plage déserte à l'embouchure de la Belle-Rivière à Métabetchouan

Plus nous cheminons vers le bout de l’embouchure, plus nous observons des limicoles qui arrivent de migration. Ah, chouette! Voilà enfin des bécasseaux pour notre plus grand bonheur! Pattes de télescope déployées, nous demeurons sur place quelques heures pour savourer ces oiseaux qui font halte dans le secteur. En bougeant le moins possible, les oiseaux deviennent confiants et se dirigent vers nous en passant à quelques pieds. La prochaine vidéo vous démontre un groupe de limicoles. Vous pouvez recenser quatre espèces. Reconnaissez-vous les Pluviers semipalmés (au loin), les Bécasseaux semipalmés (les plus nombreux), les Bécasseaux sanderlings (gros, blanc et qui courent) et le Tournepierre à collier (vu au début et à la fin)? Il vous est proposé de mettre en fonction vos haut-parleurs afin d’écouter les ressacs du lac Saint-Jean. Aussi, comme d’habitude, double-cliquez les vidéos pour en voir les agrandissements.



Limicoles s’alimentant sur la plage

Plus loin sur la plage, un magnifique et pas très commun Bécasseau de Baird s’alimente tout seul dans son coin avec pour compagnon un Bécasseau semipalmé (plus petit). En picorant à gauche et à droite, le Bécasseau de Baird a harponné avec ses griffes un duvet de plume gisant dans la rocaille. Ce duvet est demeuré sur ses pattes un très long moment. C’était plutôt drôle de le voir courir sur les berges avec cette petite pantoufle blanche sur son talon (d’Achille?). La prochaine vidéo montre mon propos.



Le Bécasseau de Baird avec sa pantoufle en duvet

Ensuite, sans crier gare, une douzaine de Tournepierres à collier sont arrivés en trombe dans le décor. Volant ici et là, comme incapable de se poser par un surcroît d’énergie, ils finissent par atterrir sur la plage, mais demeurent très nerveux et instable. Avec eux, quelques Bécasseaux semipalmés. Je vous invite à jeter un œil sur le prochain clip…



Les Tournepierres à colliers se reposant quelques minutes

Durant la matinée, j’ai eu le plaisir de rester près de quatre limicoles peu farouches. Étant des oiseaux juvéniles, je suis peut-être la première du genre humain qu’ils voient! Je me suis donc immobilisée et j’ai restée discrète pour en croquer quelques clips en calculant chacun de mes gestes pour les filmer afin de ne pas les effaroucher. Il s’agit de trois Bécasseaux semipalmés et d’un Bécasseau minuscule (celui qui est roux et qui se tient sur une patte) qui se reposent pour piquer une sieste. Ils sont vraiment attendrissants et mignons comme tout! De plus, il y a un Bécasseau semipalmé qui m’a bien fait rigoler. Celui-ci a décidé de roupiller dans un petit trou d’eau dans le sable. S’il devait se déplacer, il revenait à ce trou d’eau. Il faut croire qu’il aimait se rafraîchir les pattes…



Bécasseaux semipalmés et le Bécasseau minuscule

Qui dit plage dit également goélands! Au bout de l’embouchure, il y avait un minimum de 500 Goélands à bec cerclé, adultes et jeunes de l’année, ainsi que quelques Goélands argentés, qui se prélassaient et baillaient aux corneilles sur les bancs de sable. Habitués à la présence humaine, ceux-ci quittent les lieux pour la journée et vont s’alimenter dans les champs lorsque l’achalandage devient trop important.


Goélands sur leur aire de repos à l'embouchure


Une partie du groupe des goélands


Germain observant les limicoles sur une languette de plage

Ainsi s’achève notre matinée aux limicoles à l’embouchure de la Belle-Rivière. À l’heure du midi, les gens commencent à arriver sur les lieux. Il faut signaler que les terrains de camping qui se trouvent aux abords de l’embouchure sont encore actifs à cette date du 28 août. Nous quittons le site, heureux de nos belles trouvailles, la tête pleine de merveilleux limicoles. En tout, nous avons recensé 12 espèces de bécasseaux avec un Courlis corlieu en poche que nous avons entendus crier. Là-dessus, je vous laisse sur un clip servant de détente avant de reprendre votre routine!



Vagues causées par Irène sur le lac Saint-Jean

dimanche 21 août 2011

La petite vie d’un Cormoran à aigrettes futé

Alors que Germain et moi observions les espèces aquatiques dans le marais de Canards Illimités à Saint-Fulgence, nous sommes surpris de voir subitement atterrir dans le marais un Cormoran à aigrettes immature. Pourtant, la rivière Saguenay est proche et il a tout le fjord pour subvenir à ses besoins alimentaires. Mais, il est là devant nous dans toute sa splendeur. La prochaine vidéo démontre l’arrivée de l’oiseau filmée in extremis pour la vidéaste. Ensuite, le cormoran explore visuellement son environnement pour finalement plonger.


Cormoran à aigrettes arrivant dans le marais

Ce cormoran est resté dans le marais au moins deux jours, question d’en retirer les ressources premières : les poissons! Nous ne savons pas pourquoi il préfère les poissons d’eau douce du marais aux poissons marins dans l’entrée du fjord. Peut-être la pêche est-elle plus facile à faire dans l’eau peu profonde du marais? Ce cormoran est peut-être du genre paresseux, qui sait? Dans tous les cas, le clip qui suit montre le cormoran (de dos) qui avale une grosse proie. Le cou élastique de l’oiseau ne cesse de m’impressionner!


Cormoran avalant un poisson de bonne taille

J’aime beaucoup les cormorans… Ils sont drôles avec leurs allures d’oiseaux préhistoriques. D’autre part, ils sont de redoutables prédateurs pour les poissons. Sous l’eau, ils prennent la forme d’une torpille ailée qui poignarde les proies qui nagent sur leur chemin. Revenons à notre cormoran… Dans le marais, lorsque le cormoran en a terminé avec sa pêche, il se secoue, s’étire et s’envole à l’autre bout du marais. Les images où celui-ci étale complètement les ailes sont simplement magnifiques! Voyez plutôt dans le clip suivant.


Cormoran s’ébrouant

Ayant mangé à souhait, le cormoran se pose par la suite sur un arbre mort afin de se reposer et se faire sécher les ailes sous un soleil radieux. Pendant qu’il sèche son plumage, l’oiseau dort avec la tête déposée sur le dos. Quelle souplesse! Cependant, il se fait déranger quelque peu lorsque que des canards barboteurs et un grèbe passe devant lui. Et voilà pour l’histoire de la petite vie d’un Cormoran à aigrettes immature et futé qui a visité le marais!
 

Cormoran essayant de se reposer

mardi 16 août 2011

Sentier, marais et nichées (deuxième partie)

Presque à tous les jours, Germain et moi recensons les oiseaux aquatiques au marais de Canards Illimités à Saint-Fulgence. Le site regorge de canards et on se demande bien d’où les oiseaux sortent, puisqu’en juillet c’était raide mort. En ce moment, il y a des couvées de Canards chipeaux en abondance partout dans le marais. Il y a tellement de choses à illustrer sur eux que ce sera le thème du message d’aujourd’hui. Cette espèce de canard barboteur est reconnue pour nicher tardivement en saison de nidification. À cette période, l’on retrouve en même temps des poussins, des juvéniles et des immatures sur le point de voler.
 

Canards en abondance sur le marais

 
Germain faisant le guet dans l'abri

 
Les couvées de Canards chipeaux font littéralement fondre notre cœur lorsque nous voyons les poussins patauger en toute innocence au pied de l’abri. Arborant un duvet jaune pâle, presque blanc même, les oisillons picorent ici et là des brins de végétation sur la surface de l’eau. Voici des vidéos démontrant les poussins les plus « craquants » du monde!


Famille de Canard chipeau


Poussin de Canard chipeau


Poussin de Canard chipeau

 
Maintenant, je vous présente une brochette de plumage concernant cette même espèce. De poussin à juvénile, la mue s’effectue rapidement. On ne reste pas poussin longtemps lorsqu’on est un canard! Il faut grossir et vite, apprendre à être autonome, apprendre à voler et ensuite migrer en l’espace de deux mois environ!
 

Jeune chipeau qui commence à porter des plumes


Jeune chipeau presque entièrement emplumé


Lors de notre observation, il y a un chipeau immature qui nous a fait tordre de rire dans l’une des couvées… En fait, chez un individu, les plumes du dos (scapulaires) étaient relevées et mal placées. Avec les scapulaires scindés en deux, on a l’impression que l’oiseau porte des œillères. Évidemment, les plumes érigées agaçaient l’oiseau dans sa vision. De temps à autre, il tentait de les replacer en donnant un coup de bec.

 
Jeune chipeau avec les plumes déplacées
 
Quant aux femelles chipeaux, elles ont rempli leur rôle de mère avec brio, ayant pondu, ayant couvée et ensuite élevée seules leurs petits. Dès qu’elles ont été accouplées, les mâles quittent le marais et vont muer et dormir avec d’autres mâles canards barboteurs. Ce n’est pas pareil comme horaire! Dans la prochaine vidéo, voici une femelle chipeau qui prend cœur à se baigner. Nous avons l’impression qu’elle était satisfaite du devoir accompli pour cette saison de nidification, les jeunes étant devenus autonomes!

 
Baignade de la femelle Canard chipeau
 
Voici des photographies démontrant la femelle et le mâle Canard chipeau au plumage de printemps. À l'automne, les adultes et les immatures se ressemblent tous.
 
Femelle Canard chipeau au printemps


Mâle Canard chipeau au printemps

Sur ce, je vous laisse sur un splendide coucher de soleil pris très récemment à partir de la maison! Le soleil a aussi commencé sa migration rétrograde depuis le solstice. L’automne est à nos portes!
 

Une autre journée qui se termine...

vendredi 12 août 2011

Sentier, marais et nichées (première partie)

Au cours du mois d’août, le marais de Canards Illimités à Saint-Fulgence est un site où l’on retrouve les canards en abondance. Cela est dû au fait que de nombreuses nichées ont lieu dans le marais et que les canards migrateurs font également halte à cet endroit à cette période de l’année. S’ajoutent évidemment dans cet habitat les grèbes, les râles et les foulques. Pour ces oiseaux de type poules d’eau, la nidification fut pauvre avec très peu de nichées chez les foulques et les grèbes.

Aujourd’hui, j’ai pensé vous faire le tour de propriétaire et vous montrer la plate-forme d’observation située au niveau du marais. À cet endroit, les observateurs, photographes, vidéastes et touristes viennent fréquemment dans cet abri spécial. Il faut d’abord se rendre au Centre des Battures (CIBRO) situé au cœur du village. À partir du stationnement, nous devons emprunter un petit sentier étroit à pente douce, bordée d’arbres fruitiers et d’une végétation luxuriante. Au bout du sentier se trouve cet abri où un mur en bois muni d’orifices nous cache en bonne partie de la vue des canards qui circulent sur l’eau. Il suffit de s’asseoir sur les bancs disponibles dans l’abri et se régaler les yeux!


Sentier menant à la plate-forme d'observation


La plate-forme au bout du sentier


Les orifices permettant l'observation et la photographie


Paysage au travers d'un orifice


Lors de cette journée d’observation, Germain et moi localisons deux nichées de Fuligules à tête rouge qui sont présentes. Sur une pointe de terre, une femelle et sa couvée piquent un brin de toilette comme le démontre la prochaine vidéo (comme d’habitude, veuillez double-cliquer sur la vidéo pour en voir les agrandissements).



Petite famille de Fuligules à tête rouge

Encore plus près de nous, la deuxième nichée comporte des juvéniles non capables de voler, mais qui sont parfaitement autonomes pour se nourrir seul. Les jeunes de la même nichée se tiennent ensemble. Ils plongent dans un endroit peu profond pour s’alimenter, sans que la surveillance ou la présence de la femelle ne soit exigée.



Jeunes Fuligules à tête rouge plongeant pour s’alimenter

La prochaine espèce dont je traite dans ce message est le comique Grèbe à bec bigarré. Dans le prochain clip, je vous invite à ouvrir vos haut-parleurs. Vous entendrez pendant toute la vidéo les pépiements incessants d’un très jeune grèbe quémandant sa ration de nourriture. En fait, ces « pit, pit, pit….. » sont entendus des heures durant! L’adulte, qui semble vouloir prendre une pause, s’étire d’une drôle de façon. Ensuite, le juvénile vient insister auprès de l’adulte avec un grand « I ». Le mot « téter » prend tout son sens ici! Sur son passage, le poussin bouffe à moitié un gros duvet flottant à la surface de l’eau. C’est vrai qu’il a faim celui-là! L’adulte consent à plonger pour récolter de menus poissons, calmant temporairement le petit ogre qui attend son dîner et qui en redemande. Remarquez le silence qui revient lorsque le parent plonge et sort du champ visuel du juvénile.



Adulte Grèbe à bec bigarré nourrissant son jeune

En terminant ce message, je vous montre un clip d’un Rat musqué transportant de la végétation fraîche vers sa hutte. Les allés et retours de cette espèce sont fréquents dans le marais. La tête légèrement inclinée sur un côté, trimbalant le feuillage dans sa gueule, il ne me lâche pas des yeux, me voyant le filmer.



Rat musqué transportant des feuilles de quenouilles

lundi 8 août 2011

L’Érismature rousse : être ou ne plus être?

Aujourd’hui, la chronique traitera uniquement de l’Érismature rousse, des comportements observés au cours de la saison de nidification ainsi que de leur situation précaire au marais de Canards Illimités situé à Saint-Fulgence. Cette espèce demeure très rare dans la région et en fait la spécialité de ce marais. De plus, ce superbe canard nous fait l’honneur d’y nicher depuis quelques années. Il s’agit du seul endroit connu au Saguenay-Lac-Saint-Jean où cette espèce est trouvée nicheuse. Mais est-ce que l’érismature fera partie encore de notre avifaune dans les années à venir? Rien n’est sûr… Un événement imprévu et important s’est produit ce printemps et changera peut-être la donne.

Tout a débuté le 30 avril dernier alors que le mâle Érismature rousse est arrivé comme prévu au marais de Canards Illimités. Même que, il s’agit d’une date d’arrivée assez hâtive pour la présence de cette espèce sous nos latitudes. Jusque-là, pas de problème. Il est observé régulièrement jusqu’au 5 mai. En ce même jour du 5 mai, une femelle est également arrivée de migration. Quelques jours plus tard, une deuxième femelle est détectée dans le marais. Cependant, après le 5 mai, les observateurs ont fouillé le marais de fond en comble pour retrouver le mâle, mais rien! Le mâle reste introuvable. Il a subitement disparu et personne n’en connaît la cause. Et là, la question se pose. Admettons que le seul mâle nicheur de la région a disparu, est-ce que l’espèce survivra dans la région au cours des prochaines années?
 
Le mâle Érismature rousse photographié en 2008 par Germain Savard

Lorsque les ornithologues se rendent compte de la disparition du mâle, nous avons souhaité qu’il ait eu le temps de s’accoupler avec la première femelle arrivée sur les lieux. Pour en connaître la teneur et les aboutissants, nous n’avons pas le choix que d’attendre plus tard en saison pour connaître la réponse, à savoir s’il y aurait une nichée ou non pendant l’été. Par contre, le peu d’optimisme qu’il nous restait s’est envolé en fumée lorsque Germain et moi avons surpris les femelles en train de rivaliser l’une et l’autre lors de la journée du 15 mai. Ce jour-là, nous avons assisté à une sorte de parade nuptiale faite par l’une des femelles, ce geste normalement exécuté par le mâle. En effet, la femelle dominante, voyant l’autre femelle nageant plus loin dans le marais, s’est mise à hocher de la tête en relevant la queue, comme un mâle en pariade. C’est la première fois que nous assistons à ce comportement de la part d’une femelle. La prochaine vidéo démontre le comportement mentionné.
 


Érismature rousse femelle pompant de la tête
 
Ensuite, le temps s’écoule et l’été s’installe. En juin et juillet, les femelles sont devenues discrètes et toujours pas de mâle à l’horizon. Son sort est définitif : il est mort. Donc, aucune couvée d’érismature n’est prévue cet été. Cet état de fait est triste et inquiétant à la fois. Lorsque les femelles quitteront le marais cet automne, reviendront-elles avec un autre mâle le printemps prochain? Dans la négative, il se peut que l’espèce « s’éteigne » dans la région. Nous voilà devant la dure réalité.

Vers la fin juillet, un autre événement nous a grandement étonné Germain et moi. Il s’agit de l’une des femelles érismatures qui, sans toute vraisemblance, a adopté un caneton d’une autre espèce de canard nichant dans le marais! Comblant son instinct maternel, nous ne savons pas comment elle s’y est prise pour kidnapper un oisillon d’une autre couvée. Nous croyons que le caneton est un Fuligule à tête rouge. Ils ne se séparent jamais et la femelle protège jalousement « son rejeton ». Quant au caneton, il accepte d’emblée sa mère adoptive et n’en semble pas le moindrement perturbé, au contraire. Il a l’air paisible et en très bonne santé. Une autre question se pose ici. Puisqu’à leur naissance les oisillons sont imprégnés visuellement de leurs parents en début de vie, qu’adviendra-t-il de l’identité de cet oisillon? Au cours de l’hiver prochain, lorsque les couples se formeront, ce caneton devenu adulte se prendra-t-il pour une Érismature rousse ou pour un Fuligule à tête rouge? Espérons pour ce dernier que les gènes prendront la relève. Dans la prochaine vidéo, vous verrez la femelle érismature plonger pour s’alimenter. Son petit attend patiemment sa mère de remplacement en surface. En aucun temps nous n’avons vu la femelle nourrir l’oisillon. Quant au caneton, il plonge à l’occasion et s’alimente de lui-même, parfaitement autonome. Débrouillard comme tout celui-là!

 

Femelle érismature et le juvénile d’adoption
 
En résumant la saison de nidification de cette espèce, nous savons maintenant que le mâle est décédé une semaine environ après son arrivée, que les femelles n’ont pas été accouplées et qu’aucune nichée d’érismatures n’a été produite lors de l’été 2011. Nous devrons attendre au printemps 2012 pour constater les faits. Est-ce que l’Érismature rousse sera ou ne sera pas dans son site de nidification lors de la prochaine saison de nidification? Telle est la question…

lundi 1 août 2011

Escapade à Métabetchouan

En ce samedi 30 juillet, Germain et moi optons pour une petite virée au Lac-Saint-Jean. Nous avons l’intention de visiter quelques sites à Métabetchouan afin de vérifier la présence ou non de certaines espèces au cœur de l’été. Notre premier arrêt s’effectue d’abord à la station d’épuration des eaux où nous recensons couramment les oiseaux dans les bassins. Un sourire s’accroche sur nos visages alors que, rendus là, deux Pluviers kildirs, un juvénile et un adulte, s’affairent à se nourrir d’insectes au pourtour de la station. Nous croyons qu’il s’agit de l’adulte protégeant son nid plus tôt cet été dans la gravière tout près de la station. Souvenez-vous du message où j’avais filmé l’adulte simulant l’aile cassée pour nous éloigner. Eh, bien! La nichée fut un succès et les jeunes sont maintenant de taille adulte. La prochaine vidéo illustre le pluvier juvénile. À cette période-ci de l’année, il est facile de déterminer s’il s’agit d’un jeune ou d’un adulte. Il suffit de regarder le bout de la queue. Chez les juvéniles, ceux-ci portent une sorte d’excroissance au bout de la queue, une sorte de plumeau qui s’effrite avec le temps, ce qui les distingue nettement des adultes.



Pluvier kildir juvénile

Par la suite, Germain et moi parcourons à pas de gélinotte les abords de la station. Nous avons l’agréable surprise d’observer quelques Bécasseaux minuscules et un Petit Chevalier en passant. De tempérament nerveux, les oiseaux n’ont pu être photographiés. Cependant, dans le bassin principal fourmillaient plein de Canards colverts ainsi que deux Garrots à œil d’or, ces derniers étant seulement de visite. Concernant les colverts, les juvéniles ont grandi à vue d’œil. Pour la plupart, ils sont de taille adulte et capable de voler.


Vue sur la station d'épuration des eaux


Groupes familiaux de Canards colverts


Couvée plus jeune de Canards colverts


Lorsque nous avons terminé notre randonnée au tour de la station, nous allons jeter un coup d’œil au Grand Marais situé dans le rang Sainte-Anne. Évidemment, c’était prévisible. Il n’y avait rien qui vaille puisque le niveau de l’eau est élevé recouvrant presque entièrement les quenouilles. Devant ces faits, nous nous enfonçons dans le rang et stationnons le véhicule près d’un petit ponceau où coule une petite rivière calme. Là, nous prêtons intérêt à recenser les passereaux dans ce secteur. Encore une fois, c’était plutôt tranquille. Nous constatons que la saison automnale approche puisque les oiseaux ne chantent presque plus ce qui fait qu’on les détecte moins facilement. Mais, en marchant dans un champ en friche, nous avons tout de même surpris une Paruline masquée qui souhaitait nourrir son jeune, celui-ci capable de se déplacer à courte distance. Le juvénile était à quelques pieds de nous. Sur notre chemin, nous entendons des « tchek » forts. Un mâle émet son cri d’alerte tenant dans son bec des insectes destinés à sa progéniture. Le temps de le filmer et nous quittons les lieux.



Paruline masquée mâle attendant notre départ

En sortant du rang Sainte-Anne, Germain remarque un papillon qui rase le capot de la voiture. Un arrêt d’urgence pour identifier et photographier ce magnifique Polygone à queue violacée qui se pose finalement sur le bord de la chaussée. Le papillon prend un bain de soleil, à l’abri du vent qui était fort cette journée-là.


Un magnifique Polygone à queue violacée

Pour terminer notre excursion à Métabetchouan, nous nous arrêtons à la halte routière au début du rang Caron. À cet endroit existe un lieu où de nombreux Urubus à tête rouge viennent se reposer au cours de l’après-midi. Il sert également de dortoir. En milieu de journée donc, lors de notre présence, pas moins de 33 urubus sont comptés. C’est beau de voir les oiseaux provenir de toutes les directions, arrivant des champs avoisinants en sous-groupes. Ils se posent tous dans une coulée bordée d’une lignée d’arbres, cet îlot de feuillus dense situé au milieu des champs cultivés. Nous avons découvert ce dortoir l’an dernier et nous avions hâte de les revoir à ce site. Au début de l’été, nous étions venus à cet endroit à quelques reprises, mais il n’y avait pas d’urubus. Selon nos observations, il s’agit probablement d’adultes non nicheurs ou ayant terminés de nicher, les individus se réunissant plus tard au cours de l’été. Nous n’avons pas vu de jeunes, seulement des adultes.

En recensant les urubus, on ne peut se lasser de les voir voler. Quelle merveille de les voir flotter dans les thermiques et le vent, sans effort, les ailes en position de dièdre prononcé! Au début de l’inventaire, nous détectons les sous-groupes d’oiseaux très loin à l’horizon. Aux jumelles, ce ne sont que des points lointains. Ce qui est impressionnant est qu’ils franchissent des kilomètres en seulement quelques instants. La prochaine vidéo démontre cinq urubus se dirigeant vers l’aire de repos. Finalement, un urubu est passé tout près de la halte routière, me permettant de croquer une belle photo de ce virtuose du vol.



Peloton d’urubus


Urubu passant tout près de nous